« L'Univers est vaste. Ses paysages, sa faune, sa flore, ses cultures et ses mystères sont d'une innombrable variété et l'histoire qui a façonné les mondes est trop longue pour être résumée. Ainsi, les érudits étudient et consignent les facettes de cette réalité en de larges ouvrages. C'est en l'un d'eux que vous trouvez réponse à vos questions. »
Avez-vous déjà été trahi par quelqu'un que vous considériez comme l'un de vos plus proches amis ? Quelqu'un que vous auriez suivi au travers des flammes et du froid, et jusqu'au confin du cosmos ? Quelqu'un sans qui le monde est tout simplement incomplet ? Aujourd'hui encore, le Coven du Zénith à quatre membres : trois sorcières, et un trou béant, qui jamais ne se refermera. - Chancey Norwich, Sorcière du Nord
A la suite de la Guerre de la Tromperie, les habitats de Karna réalisèrent que l’Âge d’Or avait abaissé leur vigilance. Ils s’étaient mis à prendre le don de la Source de la Vie pour acquis, alors que, plus qu’un droit, il s’agissait d’un devoir : celui de veiller à ce que nul ne puisse l’utiliser à des fins néfastes. Durant les années qui suivirent, la société Karnique se réorienta : les défenses autour de la Source furent renforcées et, bien que l’esthétisme resta une des priorités, l’art fut mis au service de la mission ancestrale. Pour les plus jeunes, ceux étant nés bien après la Fondation de Karna, ce nouveau mode de vie, moins idyllique que celui de l’Âge d’Or, commença à provoquer la grogne. La Source de Vie avait été donnée au peuple Alfar, le Monde n’avait le droit de la leur reprendre. Pourquoi s'embarrasser d’une mission aussi prenante et inutile ?
Cette grogne, auparavant minoritaire, gagna en popularité avec les années, si bien qu’en 2A776, le Conseil de Karna dû se réunir pour trouver un moyen de les apaiser. Afin de mieux comprendre les revendications des protestataires, il fut organisé des pourparlers : le Sorcier de l’Est, Dwayne Eswich, fut chargé de discuter avec eux, au nom du Coven du Zénith. Malheureusement, le Conseil ignorait que cela était exactement ce que le Sorcier attendait. Après coup, des lettres furent retrouvées prouvant qu’il avait été l’un des acteurs majeurs derrière la protestation. Celui-ci avait, en privé, un désaccord avec la Fondatrice depuis la Guerre de la Trahison. Là où elle prônait une utilisation pacifique du pouvoir de la Source de la Vie, et le fait de ne guider que les races mortelles qui en font la demande, respectant le libre arbitre, Eswich pensait plus juste de prendre le destin de la Brèche en main, pointant l’inconséquence des mortels, dont la mémoire était trop éphémère pour leur faire pleinement confiance.
Voyant que Weswich ne changerait pas d'avis, il avait ourdi un plan avec un petit noyau de rebelle, les plus extrêmes : ils pretextèrent tenir les négociations au Sygil, le cœur de Karna, juste au-dessus de la Source de la Vie. Puis, la plupart des défenses déjà derrière eux, ils tentèrent une descente en force pour s'emparer d'elle, et en obtenir les pleins pouvoirs. Leur plan fut à deux doigts de réussir, mais une des créations de la Fondatrice, un des gardiens directs de la Source, réussit à s’enfuir, et à la prévenir. Celle-ci redescendit en urgence et fit face, seule, à l’escouade ayant choisi de trahir Karna.
Face à celle qui avait tant fait pour leur peuple, même les plus déterminés des traîtres hésitèrent un court instant, lui laissant le temps de prononcer une unique formule, la formule offerte par le Monde lors de la découverte de la Source, la seule formule qu’elle n’avait jamais partagée même à Eswich — le Décret de Bannissement. Alors que les mots quittèrent sa bouche, les traîtres eurent la sensation de voir leur sang bouillir dans leurs veines tandis que la Source de la Vie leur retirait sa bénédiction. Leurs corps robustes, transformés par les Arts Karniques, changèrent de nouveau, alors que la moindre trace du pouvoir de la Source les quittait, jusqu'à ce qu'il ne reste que des corps sombres et naturellement chétifs d'Alfars.
Secoués par cette métamorphose, ils furent aisément capturés, et le Conseil se réunit pour délibérer de leurs sorts. À la quasi-unanimité, la mort fut votée, mais la Fondatrice y opposa son droit de véto : la première règle de Karna interdisait le meurtre de ses citoyens, et la justice même devrait s’y plier. Il fut, à la place, décrété leur bannissement. Face à cette décision, plusieurs membres de leur famille firent le choix de les accompagner en exil, renonçant volontairement au don de la Source pour ce faire. Devant une telle démonstration de l’union du peuple Alfar, la Fondatrice fut prise d’un élan de générosité, et décréta que leur exil ne serait pas éternel : tout Alfar dont les ancêtres furent bannis de Karna pourrait revenir à sa guise, cinquante ans après en avoir fait la demande, ou en exécutant une quête au nom de la Cité Éternelle, car nul ne mérite d’être puni pour le crime de ses aïeux.
Les bannis partirent alors, se mélant aux autres populations de la Brèche. Tandis que de très rares parmi eux rejoignèrent les Alfars Ancestraux, renouant avec leur antique mode devie, la plupart se mélèrent à d'autres peuples, constituant les premiers représentants de ceux qui sont aujourd'hui appelés les Alfars Sombres.