« L'Univers est vaste. Ses paysages, sa faune, sa flore, ses cultures et ses mystères sont d'une innombrable variété et l'histoire qui a façonné les mondes est trop longue pour être résumée. Ainsi, les érudits étudient et consignent les facettes de cette réalité en de larges ouvrages. C'est en l'un d'eux que vous trouvez réponse à vos questions. »
Même parmi les Alfars de Lumière, peu sont ceux à se souvenir de la Stabilisation. A cette époque, les séquelles du Premier Âge étaient encore bien présentes. Douloureusement présentes. - Chancey Norwich, Sorcière du Nord
Commençant avec l’apparition des Gardiens de l’If, en l’an 0 du Deuxième Âge, avant de s’achever à la fondation de Karna, exactement un siècle après, la période dite de la Stabilisation fut une période de grands troubles dans la Brèche. Après la Chute de l’Empire Neivar, ainsi que les purges et les reconstructions qui s’en suivirent, la Brèche avait finalement été restaurée, seuls de rares groupes nomades ou isolés de Neivars subsistant. Cependant, en l’absence d’un ennemi commun, les Dyrvars se mirent à s’affronter entre eux.
Cette guerre intestine — attisée, dit-on, par des Neivars qui virent là l’opportunité de distraire leurs chasseurs — mena à des exactions de plus en plus nombreuses envers les Alfars. Là où avant, ils étaient systématiquement pris prisonniers, les Tribus Dyrvars se mirent à préférer avoir l’assurance d’exterminer leurs ennemis plutôt que de prendre un tel risque. L’accumulation de ces exactions finit par résulter en l’exode des Alfars à l’Ouest de la Brèche, fondant la Cité de Karna, plus vieille cité de la Brèche encore debout de nos jours.
Malgré l’intervention des Lifars, le chaos continua de régner au début du Deuxième Âge, tandis que les dernières poches de résistances Neivars tombaient aux mains de leurs anciens esclaves. Ceux-ci, privés de leurs invocations démoniaques par les actions des anciens Alfars, avaient tout de même réussi à résister, usant de reliques maudites de l’Empire et de structures impies, consommant les âmes de leurs victimes comme de leurs manieurs.
Mais ils étaient trop peu nombreux pour espérer tenir, et, rapidement, des vainqueurs commencèrent à émerger, tribus de Dyrvars ayant réussi à mieux s’organiser que les autres, et ayant repris partie des anciennes infrastructures de l’Empire pour obtenir un avantage tactique non seulement sur les Neivars, mais également sur leurs congénères. Les plus influentes furent les Gahrs, nom donné aux Dyrvars Oie suivant le Dieu Sauvage de la Guerre, ainsi que l’Alliance Cornue, composée des Moltös, des Waraboucs et des Corthirs, Dyrvars Moutons, Boucs et Vaches respectivement.
Une autre tribu de Dyrvar se fit sinistrement remarquer lors de cette période : les Mühnirs, Dyrvars Corbeaux, qui furent à la source de très nombreux massacres de Neivars. Tandis que les autres peuples agissaient de manière impulsive, les Mühnirs, ayant pris le contrôle de Skalheim, antique forteresse volante de l’Empire Neivar, agissaient de manière précise et méthodique. Aujourd’hui, on estime que la perte d’au moins 20% de la population de l’Empire Neivar est due à l’action de cette seule tribu.
Dix ans après le début du Deuxième Âge, le paysage géopolitique commença finalement à redevenir assez stable pour que l’apparition de structure administrative relativement grande n’ait lieu. Ces quelques décennies de stabilité sont appelées la période des “Ligues Dyrvars”. Comme indiqué dans le nom, les tribus Dyrvars de philosophies proches — ou de places dans la chaîne alimentaire — ayant assis leurs autorités sur des territoires suffisamment imposants formèrent des pactes d’alliance si intriqués qu’elles devinrent rapidement plus proches des ligues étatiques que des cités indépendantes.
Malgré les conflits incessants entre ces alliances, leur existence même donna une forme de stabilité au bassin central de la Brèche, de 2A 10 en 2A 54, stabilité qui ne fut malheureusement pas partagée sur le reste de celle-ci. La Prairie de l’Ouest, ancien nom donné à l’emplacement actuel de Karna, fut particulièrement chaotique : une dernière poche de résistance Neivar, tentant désespérément de faire revenir les démons au travers de sacrifices de plus en plus cruels, tenait encore debout, tant bien que mal, les tribus alentour de Dyrvars étant emmêlés dans diverses guerres intestines.
Durant le Premier Âge, les Neivars, ceux-ci, désespérés, tentèrent l’invocation d’un démon particulièrement puissant. Une troupe de Manar réussit à arrêter celle-ci avant qu’elle ne soit complète, mais l’explosion résultante piégea l'entièreté de la Clairière du Nord dans un dôme de glace. En 2A 54, celui-ci finit de fondre, révélant des terres désormais recouverte d’une épaisse couche de gel. De nombreux Dyrvars et Manars s’y trouvant, ayant réussi à survivre des années durant dans le froid et les ténèbres fuyèrent ces terres désolées. Ils furent accompagnés par les rares survivants de la tribu des Alfars du Nord, porteurs d'une triste vérité : bloqués dans ce dôme, sans nourriture ni eau, la faim avait poussé les Ars à s'entre-dévorer, sous les caprices d'un entité terrible que les locaux nommées simplement la Faim...
La plupart des tribues Dyrvars libérées, agressives, fondirent sur la Ligue Cornue, la forçant à dévier une partie des forces occupées à la défendre contre la Ligue d’Acier. Par malchance ou fait du destin, cet affaiblissement eut lieu simultanément avec le sacre de Felguer Nanpax, nouvelle Waermaester des Gahr, guide à la fois militaire et spirituelle du peuple belliqueux. Son impulsion galvanisa le reste de sa Ligue, et les attaques aux frontières de celle-ci redoublèrent de férocité. Pris sur deux fronts différents, la Ligue Cornue finit par s’effondrer en 2A 57, après le sac de Dahur, cité-état des Waraboucs. Les rares Waraboucs restant prirent la fuite en direction des montagnes de l’Est de la Brèche.
Tandis que le regard de la Ligue d’Acier se portait naturellement sur les restes de la Ligue Cornue, leur série de conquêtes fut interrompue par une violente révolte Manar à l’Ouest de leur territoire, dans ce qui est aujourd’hui connu comme la Vallée des Dames. Celle-ci, conquise aux balbutiements de la Ligue, était déjà la maison de plusieurs clans de Manars, entités négligeables à l’époque. Cependant, nombre des réfugiés du Nord les avaient rejoint cette région si bien que la population Manar y avait presque quintuplé.
La longue distance à parcourir pour les armées de la Ligue d’Acier, toujours sur les terres de l'ancienne Ligue Cornue, laissa un temps assez large pour permettre aux Manars de détruire les cités de la Ligue se trouvant sur leur territoire, marchant au son des chants à l'honneur de leurs divinités, les Dames. Alors qu'il devint rapidement clair que les clans n’avaient pas d’intentions agressives une fois leur domaine reconquis, la décision fut prise par Felguer d’abandonner purement et simplement la région (à dominante Wülfir) refusant d’engager les armées Gahrs dans un combat qu’il serait impossible de gagner sans lourdes pertes, la pugnacité des Manars étant, déjà à l’époque, connue et redoutée.
Avec la Ligue Cornue en lambeaux, et ses armées descendues au Sud, il ne restait qu’une cible digne du Waermaester facilement accessible. Le regard des enfants du Dieu de la Guerre se tourna finalement vers la Ligue Septentrionale, et les armées de celle-ci commencèrent leur marche, en 2A 61. Malgré tout le génie militaire de Felguer, la Ligue Septentrionale était prête. Cela faisait plusieurs années que la Ligue majoritairement diplomatique avait développé grandement sa force militaire, centrée autour des Fropnirs, Dyrvars Grenouilles, ainsi que des Arniars, enfants du Déesse de la Chasse. Le but était non pas de triompher des forces de Felguer, car ses armées semblaient être invincibles, mais de les harceler dans les montagnes constituant les territoires de l’Alliance Septentrionale, afin de leur empêcher toute progression.
Ce jeu de chat et de la souris étira la guerre sur plusieurs décennies. Malheureusement pour la Ligue Septentrionale, là où d’autres nations auraient abandonné, pour les Dyrvars de la Ligue d’Acier, menés par des croyants de Gahrin, la paix n’avait jamais été une option. Aussi, le conflit se prolongea, encore et toujours, et ce jusqu'à ce que certaines cités commencèrent à tomber. La première à choir, après pas moins de 23 ans de conflit, fut Hopinbur, foyer des Fropnirs. Puis, dans l’année suivante, une autre tomba… Et une autre… Et encore une autre. Cela provoqua un vent de panique au sein de la Ligue Septentrionale, certaines villes décidant de s’en séparer, pour tenter de s’en sortir seul. Bien sûr, ces mouvements ne firent qu'accroître le désastre, et petit à petit, il sembla que rien ne pouvait arrêter l'avancée des armées adverses.
En 2A 87, alors que l'armée de la Ligue de Fer s'approchait de Nhid, eut lieu la Trahison Wulfir, une ultime tentative des Pilinas d'empécher leur conquête. Malheureusement, leur calcul échoua, et les Wulfirs fuyèrent, s'exilant dans la Clairière du Nord. Malgré ses lourdes pertes, l’armée de Felguer se remit en marche en direction de Nhid et, encore une fois dans ce siècle, la destruction fut immense. La ville fut rasée jusqu’à la dernière pierre et toutes les colombes, ainsi que les Alfars les accompagnant, furent passées au fil de l’épée. La colère de Felguer fut telle qu’elle exécuta même certains Alfars de son camp, qui protestèrent au traitement de leurs congénères. Puis, après plus d’une semaine à piller et détruire la ville, elle repartit en direction du cœur de son empire, pour regarnir son armée… Et s’occuper des traîtres.
Sans opposition majeure, les Gahrs continuèrent leurs conquêtes sur les restes des deux autres Ligues, massacrant tous ceux s’opposant à eux, jusqu’en 2A 96, où, exception faite de la Vallée des Dames, l’intégralité de la plus grande clairière de la Brèche tomba sous leur contrôle. Il est dit que, le jour même où la nouvelle de la chute du dernier bastion ennemi tomba, Felguer, dominant désormais tout ce qu’elle désirait conquérir, s’assit sur sa chaise de commandement, avant d’expirer pour la dernière fois, son rôle accompli.
Tandis que les Gahrs étaient occupés à trouver un nouveau Waermaester, un autre événement d’importance se déroula dans la Brèche : l’Appel de la Fondatrice en 2A 99. A l'époque, les Alfars étaient encore divisés en cinq grandes tribues, en charge de différents clans Dyrvars - une pour chaque point cardinal, et une dernière tribue, la tribue centrale. En plus de celle-ci, de nombreuses tribues, plus petites, se trouvaient ça et là, souvent liées à des tribues Dyrvars locales.
Face aux divers massacres ayant secoués son peuple, Everildis, cheffe de la tribu de l’Ouest des Alfars, implora le Monde de trouver un moyen pour sauver son peuple. La tribu du Nord ? Dévorés par leurs frères Dyrvars. L’Est et le Sud ? Massacrés par l’ambition et la colère de Felguer… Le Monde, prenant ce triste peuple sous son aile, révéla ainsi à Everildis l’emplacement de la Source de la Vie, fontaine éternelle donnant l’immortalité et la capacité de modeler le vivant à quiconque ayant bu son eau.
Face à cette découverte, Everildis envoya des émissaires à toutes les communautés Alfars de la Brèche, peu importe leur taille. Face à cette opportunité d’échapper à la souffrance perpétuelle infligée par les autres races, les Premiers-Nés entreprirent en nombre de rejoindre le lieu indiqué par la Fondatrice. De toutes les grandes tribus, seule la tribu centrale refusa l’appel, celle-ci ayant été majoritairement épargnée par les guerres, car traitant surtout avec les Dyrvars Végétaux, qui n’avaient pas pris grande part aux conflits.
Une fois arrivés, les chefs de chacune des grandes tribus furent accueillis par Everildis, qui les amena jusqu’à la Source afin qu’ils puissent y boire. Ces gorgées leur donnèrent non seulement une vitalité éternelle, mais également un savoir accru sur la véritable nature de la vie. Prenant comme nom leurs régions d’origine, ils devinrent Weswich, la Sorcière de l’Est, Norwich, la Sorcière du Nord, Southwich, le Sorcier du Sud et Eswich, le Sorcier de l’Est, et formèrent le Coven du Zénith, les quatre fondateurs historiques de Karna. Se mettant d’accord sur la marche à suivre, ils firent boire à la Source tous les autres Alfars présents, et entamèrent les fondations de la Cité Éternelle en 2A100.